Retour
Page d'accueilDans un secteur en perpétuelle évolution, s’informer et décrypter l’actualité juridique nécessite beaucoup d’énergie. C’est pourquoi nous vous proposons, chaque mois, de vous donner accès à l’essentiel du droit de l’énergie et de la régulation. L’exercice n’est pas aisé et nous ne pourrons prétendre à l’exhaustivité. Mais nous espérons que vous trouverez cette veille utile !
Communication de la CRE sur le mécanisme de capacité | |
CJUE - Recours en manquement contre l’Allemagne relatif à l’indépendance du régulateur national de l’énergie et à la notion d’« entreprise verticalement intégrée » | |
L’EUROPE | Abus de position dominante - approbation par la Commission des mesures proposées par l’Etat grec afin de mettre fin aux pratiques du producteur et fournisseur historique en électricité |
LA REGULATION | Autorité de la concurrence - publication de deux rapports relatifs au mécanisme d’ARENH et aux TRVE |
ET AUSSI… | Rapport du CEER sur les modèles commerciaux innovants et les défis liés à la protection des consommateurs |
Pour consulter la veille juridique : déroulez cette page ou téléchargez la veille en version .pdf
Un décret et un arrêté interministériel du 29 septembre 2021 modifient les articles R. 174-27 et R.174-28 du code de la construction et de l’habitation ainsi que l'arrêté du 10 avril 2020 relatif aux obligations d'actions de réduction des consommations d'énergie finale dans les bâtiments à usage tertiaire.
En effet, l'article L. 174-1 du code de la construction et de l'habitation prévoit l'obligation de mise en œuvre d'actions de réduction de la consommation d'énergie finale dans les bâtiments existants à usage tertiaire afin de parvenir à une réduction de la consommation d'énergie finale pour l'ensemble des bâtiments soumis à l'obligation d'au moins 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050 par rapport à 2010. Cette obligation concerne les propriétaires et, le cas échéant, les preneurs à bail de bâtiments dont la superficie à usage tertiaire est supérieure à 1 000 m².
A ce titre, les propriétaires ou preneurs à bail de tels bâtiments sont tenus de transmettre annuellement leurs données de consommation sur une plateforme numérique mise en place par l’Etat de recueil et de suivi de la réduction de la consommation d’énergie finale. Le gestionnaire de la plateforme numérique procède ensuite à l’exploitation des données et à la vérification du respect des objectifs susvisés. Des mesures de contrôles et des sanctions administratives sont prévues en cas de non-respect de l’obligation de transmission des données ou des objectifs prévus par la loi.
Afin de s'adapter à la crise sanitaire, l’arrêté du 29 septembre 2021 reporte l’obligation de communication de ces données au 30 septembre 2022.
Consulter le décret du 29 septembre 2021
Consulter l’arrêté du 29 septembre 2021
Par une délibération du 23 septembre 2021, la CRE communique sur le mécanisme de capacité.
Si la CRE ne remet pas en cause l’utilité d’un mécanisme de capacité destiné à assurer la sécurité d’approvisionnement du système électrique français en permettant de couvrir les pics de consommation, elle fait cependant les constats suivants :
Face à ces constats, la CRE estime qu’il est nécessaire de mener une réflexion approfondie sur la structure du mécanisme de capacité en vue de l’évolution des règles. Elle souhaite que ces travaux aboutissent sous 18 mois, afin d’entamer au plus tard début 2023 la procédure d’examen de la refonte du mécanisme de capacité par la Commission européenne au titre de la réglementation relative aux aides d’Etat et permettre une mise en œuvre des nouvelles règles pour 2025.
Consulter la délibération du 23 septembre 2021
Par une délibération du 9 septembre 2021, la CRE approuve les nouvelles modalités de mise sur le marché des garanties de capacité obtenues par RTE au titre de la gestion des interconnexions régulées.
Ces modalités intègrent désormais les modalités de vente des garanties de capacités d’interconnexions régulées issues d’un rééquilibrage à la hausse des capacités transfrontalières.
Consulter la délibération du 9 septembre 2021
A la suite d’un recours en manquement introduit par la Commission européenne, la CJUE a rendu le 2 septembre 2021 un arrêt condamnant la République fédérale d’Allemagne pour mauvaise transposition des directives 2009/72/CE (directive « électricité ») et 2009/73/CE (directive « gaz »).
La Cour retient que la loi allemande confère directement au gouvernement fédéral certaines compétences exclusivement réservées à l’autorité de régulation nationale (ARN), de même qu’elle lui attribue le pouvoir d’habiliter l’ARN à exercer ces compétences, ce qui s’avère contraire à l’indépendance décisionnelle de l’ARN prévue par les directives. La Cour relève à cet égard que « la pleine indépendance des ARN à l’égard des entités économiques et des entités publiques (…) est nécessaire pour garantir que les décisions prises par les ARN soient impartiales et non discriminatoires (…). En outre, la stricte séparation à l’égard du pouvoir politique permet aux ARN d’inscrire leur action dans une perspective à long terme, qui est nécessaire pour réaliser les objectifs des directives 2009/72 et 2009/73. »
La Cour considère également que l’Allemagne a incorrectement transposé les directives en retenant dans son droit national une notion d’« entreprise verticalement intégrée » (EVI) limitée aux entreprises exerçant leurs activités au sein de l’Union européenne. De même, la Cour considère que les règles applicables aux personnels des EVI ne sont pas suffisamment contraignantes s’agissant par exemple des périodes transitoires applicables aux responsables de la direction et/ou membres des organes administratifs du gestionnaire de réseau de transport. Selon la Cour, le droit allemand est contraire aux dispositions des directives en limitant l’application de ces périodes transitoires au seul personnel des entités de l’EVI qui opèrent dans les domaines de l’électricité ou du gaz naturel, considérant que la notion d’EVI englobe toutes les entreprises contrôlées quelle que soit leur activité, et non les seules activités dans les domaines de l’électricité et du gaz.
Consulter l’arrêt de la CJUE du 2 septembre 2021
Dans le cadre d’un litige opposant une société ukrainienne au gouvernement moldave, la Cour d’appel de Paris a été amenée à poser à la CJUE des questions préjudicielles relatives notamment à la définition d’un « investissement » au sens du Traité sur la Charte de l’Energie (ci-après « TCE »).
Cette affaire impliquait également que la Cour détermine si le mécanisme de règlement de différend prévu par le TCE était applicable aux différends opposant un État membre à un investisseur d’un autre État membre au sujet d’un investissement réalisé par ce dernier dans le premier État membre.
Dans son arrêt « Komstroy » du 2 septembre 2021, la grande chambre de la CJUE répond par la négative à cette dernière question : elle estime en effet que l’exercice de la compétence de l’Union en matière internationale ne permet pas de prévoir, dans un accord international, une disposition selon laquelle un litige entre un investisseur d’un État membre et un autre État membre portant sur le droit de l’Union puisse être soustrait au système juridictionnel de l’Union. Selon la Cour en effet, une telle possibilité serait de nature à remettre en cause la préservation de l’autonomie et du caractère propre du droit de l’Union.
Par conséquent, si le TCE peut imposer aux États membres de respecter les mécanismes arbitraux qu’il prévoit dans leurs relations avec les investisseurs d’États tiers qui sont également parties contractantes de ce traité au sujet d’investissements réalisés par ces derniers dans ces États membres, la préservation de l’autonomie et du caractère propre du droit de l’Union s’oppose à ce que le TCE puisse imposer les mêmes obligations aux États membres entre eux.
En ce qui concerne la question relative à la définition d’un « investissement » au sens du TCE, la Cour conclut que l’acquisition d’une créance issue d’un contrat de fourniture d’électricité, non associé à un investissement ne constitue pas un « investissement », au sens de ces dispositions.
Consulter l’arrêt de la CJUE du 2 septembre 2021
Le TUE s’est prononcé, le 15 septembre 2021, sur le recours dirigé contre la décision de la Commission européenne en date du 26 juillet 2019 concernant les aides d’Etat mises à exécution par la République française en faveur de six parcs éoliens en mer.
La Commission européenne a en effet conclu que les effets positifs sur l’environnement de chacune des aides litigieuses l’emportaient sur d’éventuels effets négatifs de distorsion de la concurrence, et a relevé que, dans la mesure où le financement de ces aides reposait sur une taxe qui ne frappait pas l’électricité, il n’existait pas de risque de discrimination.
Saisi par des pêcheurs d’un recours contre cette décision de la Commission, le TUE rejette ce recours comme irrecevable. Le Tribunal considère en effet que les marchés sur lesquels les pêcheurs requérants et les bénéficiaires des aides litigieuses vendent leurs produits respectifs sont totalement distincts, et que leur processus de production respectif n’implique pas l’utilisation de la même « matière première ». En outre, le conflit existant entre ces pêcheurs et les bénéficiaires des aides ne procède pas d’une mise en concurrence par les autorités françaises pour l’accès aux zones prévues pour l’exploitation des parcs éoliens et leur usage.
Le TUE en conclut donc que les pêcheurs requérants ne sauraient être considérés comme des parties intéressées, recevables à introduire un recours sur le fondement d’une prétendue relation de concurrence indirecte avec les bénéficiaires des aides litigieuses.
Le TUE ajoute que les aides d’état en cause ne sauraient être considérées comme étant, par elles-mêmes, susceptibles d’avoir une incidence concrète sur la situation de ces pêcheurs.
Consulter le jugement du TUE du 15 septembre 2021
Le tribunal allemand de Düsseldorf a rejeté un recours de la société Nord Stream 2, qui développe, construit et exploitera le gazoduc éponyme, dirigé contre une décision par laquelle l’Agence fédérale des réseaux (Bundesnetzagentur) a rejeté sa demande tendant à ce que la partie du gazoduc située en Allemagne soit exemptée de la réglementation issue de la directive européenne du 17 avril 2019 sur le marché intérieur du gaz.
Si la directive prévoit la possibilité d’une telle dérogation pour « les conduites de transport de gaz entre un État membre et un pays tiers achevées avant le 23 mai 2019 », date de son entrée en vigueur, l’Agence fédérale des réseaux a considéré qu’en l’espèce le pipeline était structurellement incomplet à cette date et qu’il ne pouvait donc pas en bénéficier.
Le tribunal de Düsseldorf confirme cette interprétation, en considérant que le pipeline n’a pas été complètement construit et n’est donc pas achevé au sens de la directive, peu important qu’une décision d’investissement définitive et irréversible ait été prise par ses constructeurs avant le 23 mai 2019.
Consulter le jugement du 25 août 2021 (en allemand)
Par une décision du 10 septembre 2021, la Commission européenne a rendu juridiquement contraignantes, en vertu des règles communautaires sur les ententes et les abus de position dominante, les mesures proposées par la Grèce pour permettre aux concurrents de PPC, le producteur et fournisseur historique d’électricité grec, d'acheter davantage d'électricité à plus long terme.
La Grèce a présenté ces mesures afin de supprimer la distorsion créée par l'accès exclusif de PPC à la production d'électricité à partir de lignite, dont la Commission et les tribunaux de l'Union ont estimé qu'elle créait une inégalité des chances sur les marchés grecs de l'électricité. Les mesures correctives proposées prendront fin lorsque les centrales au lignite existantes cesseront d'être exploitées commercialement (ce qui est actuellement prévu pour 2023) ou, au plus tard, le 31 décembre 2024.
Plus d’informations sur cette affaire sont disponibles dans le registre « concurrence » de la Commission européenne au numéro AT.38700.
Consulter le communiqué de presse (en anglais)
Consulter le registre des décisions « concurrence » de la Commission européenne (en anglais)
Une consultation publique de la Commission européenne est ouverte depuis le 30 septembre jusqu’au 28 octobre afin d’évaluer la nécessité d’une réglementation pour gérer les incidences environnementales des produits photovoltaïques. La Commission européenne estime en effet qu’il est essentiel que ces produits soient respectueux de l’environnement, au regard du rôle prépondérant que ceux-ci devraient jouer dans la décarbonation du système énergétique de l’Union européenne.
Une consultation publique de la Commission européenne est ouverte depuis le 27 septembre 2021 jusqu’au 22 novembre 2021 afin de permettre d’établir les scénarios 2030-2050 relatifs à la neutralité climatique des énergo-intensifs. Cette consultation a pour but de permettre à la Commission d’évaluer les actions requises afin de mettre en place les mesures devant être prises par les institutions européennes, les Etats membres ainsi que le secteur privé.
Cette consultation se fonde sur un document de travail de la Commission européenne intitulé « For a resilient, innovative, sustainable and digital energy-intensive industries ecosystem: Scenarios for a transition pathway ».
Le 7 septembre 2021, l’Autorité de la concurrence a rendu publics un rapport d’évaluation du 24 décembre 2020 sur le dispositif d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH) ainsi qu’un rapport d’évaluation du 22 juillet 2021 sur le dispositif des tarifs réglementés de vente d’électricité (TRVE). Ces deux rapports ont été transmis au gouvernement en application des articles L. 336-8 (s’agissant du rapport relatif à l’ARENH) et L. 337-9 (s’agissant du rapport relatif aux TRVE) du code de l’énergie.
S’agissant de l’ARENH, l’Autorité relève que ce dispositif « a été globalement bénéfique » dans la mesure où il a permis aux fournisseurs alternatifs d’accéder à de l’électricité de base dans des conditions proches de celles dont bénéficie EDF pour l’utilisation de ses centrales nucléaires. Elle relève néanmoins que ce dispositif est « relativement fruste et générateur de tensions » entre les acteurs. Sur le marché de détail, l’Autorité relève que les conditions de concurrence se sont améliorées.
Enfin, l’atteinte du plafond en volume de l’ARENH en 2019 et 2020 met en évidence les limites de la régulation actuelle et appelle une réforme qui « ne pourra pas se limiter à prolonger de quelques années le dispositif actuel en déplafonnant progressivement les quantités offertes » mais qui devra s’accompagner d’une clarification et d’une hiérarchisation des objectifs qui lui sont assignés.
S’agissant des TRVE, l’Autorité rappelle qu’une telle mesure de fixation des prix doit être justifiée par des motifs objectifs d’intérêt général et s’avérer nécessaire, proportionnée et non discriminatoire.
A cet égard, l’Autorité s’interroge sur le « potentiel conflit entre, d’une part, les objectifs d’intérêt général de protection du consommateur (…) et, d’autre part, l’objectif de concurrence effective qui est, en pratique, également assigné aux TRV (…) ». Le rapport analyse également les différents objectifs susceptibles de justifier l’existence des TRV, notamment celui de stabilité des prix qui « mérite réexamen » au regard des augmentations liées à l’écrêtement des demandes d’ARENH et de l’exposition encore plus importantes des consommateurs au marché qui en résulte.
L’Autorité considère que les TRV demeurent une offre de référence, simple et relativement sûre pour les consommateurs, qui facilite leur orientation sur le marché et qui joue un rôle de stabilisateur général des prix, tout en assurant un retour des investissements publics dans le parc nucléaire. Elle s’interroge néanmoins sur leur compatibilité avec le droit de l’Union et souligne qu’il « n’est pas exclu » que le gouvernement puisse être conduit à devoir envisager la fin des TRV et à réfléchir à des mesures non tarifaires alternatives pour protéger les consommateurs vulnérables, par exemple le retour à un tarif de première nécessité ou encore l’obligation pour tout fournisseur de proposer une offre simple standardisée.
Consulter le rapport d’évaluation sur le dispositif des tarifs réglementés de vente d’électricité
Le CEER a publié le 20 septembre 2021 un rapport relatif aux modèles commerciaux innovants et aux défis liés à la protection des consommateurs dans un contexte de développements technologiques et de tendance à la numérisation sur les marchés européens de l’énergie. Ce rapport identifie ces modèles émergents et suggère les mesures réglementaires nécessaires à la protection des consommateurs. Le rapport identifie quatre défis : l’accès de nouveaux entrants sur les marchés de l'énergie, la garantie d'un choix et d'une variété suffisants pour les consommateurs en matière de produits et de services énergétiques, les implications de l'autoconsommation, l'accès aux données par les consommateurs et les entreprises. Il propose également des recommandations pour relever ces différents défis.
Consulter le rapport du CEER du 20 septembre 2021 (en anglais)