Depuis 2016, les installations produisant de l’électricité d’origine renouvelable peuvent être soutenues soit en obligation d’achat (pour les plus petites d’entre elles), soit en complément de rémunération (à partir d’un certain seuil fixé jusqu’ici à 500 kW – il sera abaissé pour toutes les filières à 200 kW à compter du 1er janvier 2026). Dix ans après l’introduction du complément de rémunération par la loi n°2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) publie un bilan de ce dispositif, conformément à l’article R. 314-50 du code de l’énergie, et formule des recommandations d’évolutions pour l’avenir.
Bilan du dispositif de complément de rémunération 2016-2025
A fin 2024, environ 25% de la production soutenue (66,7 TWh au total) bénéficient du dispositif du complément de rémunération. En outre, celui-ci est aujourd’hui la voie privilégiée pour soutenir le développement de nouvelles installations de production d’électricité renouvelable (70% des contrats engagés sur la période 2023-2024). En conséquence, la CRE estime que les contrats soutenus par le biais de contrats de complément de rémunération devraient devenir majoritaires à compter de 2032. Dans ce cadre et du fait de leur impact, il est impératif que ces contrats soient correctement dimensionnés afin d’assurer un fonctionnement optimal du système électrique.
Le bilan relève que la grande majorité des producteurs ne disposent pas des compétences en interne pour agir directement sur les marchés et font donc appel à des agrégateurs pour commercialiser l’énergie. Après quelques ajustements des pratiques contractuelles notamment en réponse à la crise, la concurrence semble satisfaisante sur ce marché de l’agrégation. La CRE restera cependant vigilante quant à la capacité des plus petits producteurs à contractualiser avec des agrégateurs dans de bonnes conditions.
Certains signaux de marché sont bien intégrés par les producteurs dans la phase d’exploitation, en particulier la non-production en cas de prix négatifs. La CRE note toutefois qu’il est indispensable qu’une meilleure coordination s’opère entre producteurs et agrégateurs afin que les premiers puissent encore mieux prendre en compte les signaux du marché (placement des maintenances, transmission des informations d’indisponibilité,…), tout en n’étant pas directement confrontés à celui-ci.
Enfin, même si la comparaison entre pays européens est relativement peu aisée, la CRE observe sur le marché français un transfert de risques aux producteurs de niveau « moyen » s’agissant de la définition du prix de marché de référence M0* et une couverture relativement protectrice des épisodes de prix négatifs
Recommandations de la CRE pour faire évoluer le dispositif à l’avenir
Forte de ces constats, la CRE formule neuf recommandations pour faire évoluer le dispositif à l’avenir, visant notamment à exploiter au mieux les leviers dont disposent les installations soutenues pour optimiser leur profil de production et leur bonne intégration au système électrique français, tout en limitant l’impact sur le budget de l’Etat.
Une première série de recommandations vise à bien calibrer le prix de marché de référence M0 afin qu’il soit le plus efficient possible. En effet, les installations sous complément de rémunération sont généralement incitées à battre cette référence en produisant davantage lors des heures pour lesquelles cela est le plus utile au système électrique. Dès lors, le bon calibrage du prix de marché de référence est essentiel. Ainsi la CRE recommande :
- l’introduction d’une prime de performance annuelle, sans pour autant revenir sur le pas de temps de calcul, en général mensuel, du complément de rémunération ;
- l’introduction d’une pondération pour certaines filières,
- la mise en place d’une stratégie de couverture par l’Etat des volumes soutenus, tout en conservant le prix de référence marché M0 calculé intégralement comme une moyenne de prix spot.
Une deuxième série de recommandations vise à dimensionner correctement la prime pour prix négatifs. La CRE considère que cette dernière a permis d’encourager efficacement la baisse de la production lors des périodes de prix négatifs. Toutefois, pour prévenir toute compensation excessive de l’Etat, la CRE recommande
- l’amélioration de son calibrage à court terme (mise en place d’une franchise harmonisée, compensation des installations sur la base d’une estimation plus dynamique de la perte de production) ;
- la mise en œuvre d’une ou plusieurs expérimentations afin d’être en mesure à moyen terme d’alimenter la réflexion sur une évolution potentiellement plus conséquente de cette prime : une augmentation significative de la franchise d’heures à prix négatifs non compensées (300 heures par exemple) testée sur un appel d’offres portant sur des installations photovoltaïques pourrait par exemple encourager le développement de projets couplant solaire photovoltaïque et batteries et ainsi diminuer la survenance de prix négatifs.
La troisième série de recommandations porte sur des aspects plus techniques.
* Le prix de référence marché M0 est la référence de prix marché correspondant généralement aux revenus moyens de la filière par MWh lié à la vente de sa production sur les marchés de gros.