Expérimentation par Engie et Enedis d'une option tarifaire à pointe mobile incitant les consommateurs à réduire leur puissance pour lisser la pointe de transit sur les réseaux.

Contexte et ambitions

Les réseaux d'électricité sont dimensionnés en fonction de la pointe de puissance transitant sur les lignes. Une augmentation de cette puissance de pointe peut nécessiter la réalisation de travaux coûteux de renforcement des réseaux. On considère alors que les coûts marginaux d'acheminement de l'électricité sont plus élevés durant les heures de pointe, qualifiées de dimensionnantes. Le tarif d'acheminement de l'électricité (le TURPE) est construit par la CRE afin de refléter les coûts marginaux. Ainsi, l'option Heures Pleines / Heures Creuses permet de payer moins cher durant les huit heures de moindre transit sur les réseaux, envoyant un signal-prix aux consommateurs les incitant à adapter leur consommation. Cette option est toutefois basée sur une répartition statistique des heures de pointe durant les Heures pleines et lisse donc le signal-prix sur un très grand nombre d'heures fixées à l'avance.

Afin de refléter les conditions réelles d'exploitation des réseaux et de mobiliser la flexibilité des consommateurs de manière plus précise, le fournisseur Engie a proposé l'expérimentation NetFlex visant à tester une option du TURPE à Pointe Mobile. Il s’agit de déterminer de manière dynamique un nombre limité d'heures durant lesquelles le TURPE sera plus élevé, suivant les heures de pointes sur le réseau. Un tel tarif innovant, visant à inciter le client à déplacer sa consommation en dehors des périodes de pointes, est rendu possible par les compteurs Linky

Ce projet vise à vérifier qu'une telle option permettra au gestionnaire de réseaux de réaliser des économies et que celles-ci sont restituées au consommateur. Il est également l'occasion d'évaluer l'appétence de clients particuliers pour ce type d'offres et les contraintes techniques associées à sa mise en œuvre.

Réalisé dans le cadre du Bac à Sable réglementaire de la CRE, le projet Netflex bénéficie d'une dérogation attribuée par la délibération du 11 mars 2021. La CRE a par la suite calculé la grille de l'option tarifaire dérogatoire qu'Engie et Enedis sont chargés d'appliquer aux clients participant.

Principes

L'option du TURPE à pointe mobile est basée sur le tarif classique horosaisonalisé à 4 index (HPH pour heures pleines hiver, HCH pour heures creuses hiver, HPE pour heures pleines été et HCE pour heures creuses été) auquel se rajoute un cinquième index correspondant aux heures de pointes mobiles (HPM). Les heures de pointe mobile sont activées par Enedis en fonction de la prévision des pointes sur le réseau, jusqu'à maximum 8h par jour, sans dépasser 4h consécutives et pour un total de 100 heures par hiver. Les clients doivent être avertis à 18h la veille de l'activation des périodes de pointe mobile.

La grille tarifaire est donc adaptée pour que la facture soit plus avantageuse pour un client réduisant sa consommation sur les heures de pointe :

  • Le tarif des heures de pointe mobiles est augmenté pour refléter les coûts de réseaux et afin d'inciter le client à réduire sa consommation ;
  • Le tarif des heures pleines hiver est réduit.

Ainsi, dès son passage en option Pointe Mobile, le client bénéficie d’un tarif d’acheminement en heures pleines hiver réduit, ce qui lui permet de réaliser des économies. Pour maintenir le niveau de ses économies, le client devra réduire sa consommation lors des périodes de pointe mobiles. L'option tarifaire bénéficiera aux clients dès lors que la puissance moyenne en heures de pointe mobile sera inférieure à la puissance moyenne en heures pleines hiver. Ainsi, les économies réalisées pour le réseau sont restituées aux consommateurs flexibles.

Périmètre et calendrier du projet

Le périmètre de l'expérimentation est le département du Var.

Le calendrier du projet est le suivant :

  • 1er février 2022 : Début de l'expérimentation
  • 31 juillet 2023 : Fin de la disponibilité de l'option tarifaire dérogatoire (sauf renouvellement par la CRE)

14 premiers clients ont participé à l’expérimentation au mois de mars 2022. 

L’expérimentation s’est poursuivie entre le 1er novembre 2022 et le 31 mars 2023, avec 198 clients.

Résultats et conclusion

La CRE a constaté plusieurs biais dans les résultats de l’expérimentation, et en premier lieu le critère de recrutement des clients, restreint à l’habitat résidentiel chauffé à l’électricité et n’étant pas doté de moyens de pilotage dynamique du chauffage, qui n’a pas permis d’étudier l’intérêt d’un tel tarif pour d’autres segments de clients. 

Par ailleurs, dans le cadre de l’expérimentation, les consommateurs étaient insensibilisés aux hausses de factures, par une dissymétrisation du mécanisme (en neutralisant les surfacturations, les clients ne pouvaient être perdants) pouvant réduire le besoin de maitriser sa consommation. 

Enfin, les heures de pointe mobile ont généralement été activées par Enedis sur les périodes 8h-12h, 18h-20h et 22h-00h (en fonction des pointes locales). Cette dernière période coïncide pour beaucoup de clients avec une partie plus ou moins longue des heures creuses. Le tarif de l’option à pointe mobile ayant été élaboré selon l’hypothèse que les heures de pointe mobile remplaceraient des heures pleines hiver, la conséquence pour les clients de l’expérimentation a été une facturation désavantageuse. 

Au cours de l’expérimentation, l’échantillon de clients observé a réduit sa consommation en heure de pointe mobile d’en moyenne 11 % en comparaison des mêmes heures sur les autres journées (corrigées des variations de température), soit une puissance moyenne de l’ordre de 200 W. Une réduction de la pointe de consommation de 11 % aux heures de pointe est précieuse pour le dimensionnement du réseau électrique. Toutefois, les heures de pointe mobile correspondant aux heures de plus forte consommation sur les journées les plus froides, la consommation des clients sur ces plages reste supérieure de 24 % à leur consommation moyenne lors des heures pleines hiver. Or, la grille de l’option pointe mobile telle que calculée par la CRE nécessite un effacement de l’ordre de 24 % en heure de pointe mobile pour que le client réalise des économies. 

Cette expérimentation permet donc d’apporter des enseignements sur le calibrage de l’attractivité relative d’une option à pointe mobile vis-à-vis d’une option classique. Toutefois, la grille d’une option du TURPE a vocation à s’additionner à un prix de l’énergie et de la capacité différencié sur les plages temporelles. Ce n’était pas le cas dans le cadre de l’expérimentation : le coût d’approvisionnement était identique en période de pointe mobile et en heures pleines hiver, ce qui réduisait le signal-prix véhiculé au consommateur en comparaison d’une réelle offre de fourniture. 

Les clients ont réagi de manière hétérogène à ce signal tarifaire, avec dans certains cas des efforts disproportionnés au regard de l’énergie effacée, ce qui témoigne d’un enjeu d’appropriation par les consommateurs des puissances de leurs différents usages. Pour pallier l’effet de lassitude observé au fur et à mesure des journées de pointes, des outils de pilotage automatisé recevant des signaux dynamiques pourraient être utiles. 

Le contexte actuel de crise énergétique et d’électrification des usages amplifie l’intérêt d’offres mobilisant la flexibilité des consommateurs. Il serait nécessaire que la tarification de l’acheminement y contribue en reflétant les coûts et les besoins des réseaux. La réduction des coûts de production ou d’acheminement de l’électricité est un levier essentiel pour maitriser la facture des consommateurs. 

Une autre difficulté révélée par cette expérimentation concerne l’activation de pointes mobiles locales reflétant les conditions du réseau. Dans une poche de réseau, les heures de pointe sont généralement les mêmes tous les jours, mais le placement optimal d’un nombre limité de jours de pointes au niveau local par les équipes d’Enedis génère une importante complexité, alors que des signaux statiques, plus simples, pourraient déjà mobiliser une partie de la flexibilité des consommateurs. Pour cette raison, la CRE considère que la dérogation n’a pas permis de démontrer l’intérêt d’un recours à une pointe mobile dans les tarifs d’acheminement en basse tension.

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