La CRE réévalue les charges de service public de l’énergie à compenser en 2023 à – 32,7 Md€

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  • Les charges de service public à compenser par l’Etat aux opérateurs pour 2023 s’élèvent à – 32,7 Md€ au lieu du montant de – 11,1 Md€ inscrit dans la délibération annuelle de juillet 2022.
  • Les filières EnR en métropole continentale devraient représenter des recettes cumulées pour le budget de l’Etat de 30,9 Md€ au titre de 2022 et 2023. En prenant également en compte les régularisations des charges positives initialement prévues qui ne se matérialiseront pas, les versements des opérateurs à l’Etat correspondant au soutien aux énergies renouvelables s’élèveront à 38,7 Md€ au cours de l’année 2023.
  • Ces recettes financeront en partie les dépenses liées à la protection des consommateurs par les boucliers tarifaires et à l’amortisseur pour les entreprises.
  • La CRE alerte sur les résiliations anticipées par certains producteurs ENR des contrats de soutien, qui entraineront une perte cumulée de 6-7 Md€ pour l’Etat pour les années 2022 et 2023. La CRE recommande de renforcer la mesure de taxation des rentes infra-marginales prévues par la réglementation européenne pour ces installations.

La CRE a effectué son évaluation annuelle du montant des charges à compenser par l’Etat aux opérateurs pour 2023 dans sa délibération du 13 juillet 2022. Cet exercice repose notamment sur l’évaluation des charges prévisionnelles au titre de 2022 et de 2023. Or, le contexte exceptionnel de crise et, en premier lieu, la hausse significative des prix de gros de l’énergie au cours des derniers mois modifient considérablement les perspectives d’évolution de ces charges prévisionnelles. Ces circonstances exceptionnelles conduisent la CRE à actualiser l’évaluation annuelle réalisée en juillet 2022 et par conséquent à réévaluer le montant des charges de service public à compenser pour 2023, qu’elle notifiera aux opérateurs avant le 31 décembre 2022.

Cette réévaluation porte sur le soutien aux énergies renouvelables électriques et gazières et à la cogénération gaz naturel en métropole continentale. Elle prend en compte des références de prix plus récentes et les dernières évolutions concernant le soutien aux installations de production d’électricité intervenues depuis la délibération de juillet 2022.

La CRE procède également à l’évaluation du montant des pertes subies par les fournisseurs de gaz naturel au titre du bouclier tarifaire pour le gaz naturel au cours du second semestre 2022, via une délibération concomitante. Les charges correspondantes sont intégrées dans la réévaluation des charges pour 2023.

Les charges à compenser par l’Etat aux opérateurs pour 2023 s’élèvent ainsi à – 32,7 Md€ (au lieu de – 11,1 Md€ dans la délibération de juillet 2022), en baisse de 40,3 Md€ par rapport à l’évaluation réalisée en juillet 2021 pour les charges à compenser en 2022, qui s’élevait à 7,6 Md€. Cette évaluation prend en compte :

  • le montant prévisionnel des charges hors gels tarifaires qui seront supportées au titre de 2023, qui s’établit à – 16,5 Md€ (au lieu de - 0,9 Md€ estimé en juillet 2022) ;

  • la régularisation des charges hors gels tarifaires au titre de l’année 2022, à hauteur de - 17,3 Md€ entre la prévision initiale réalisée en juillet 2021 (8,8 Md€) et la prévision mise à jour qui s’établit désormais à – 8,5 Md€ (au lieu de – 0,6 Md€ estimé en juillet 2022) ;
  • la régularisation des charges hors gels tarifaires au titre de l’année 2021, à hauteur de - 1,9 Md€ entre la dernière prévision de 8,0 Md€ réalisée en juillet 2021 et les charges constatées qui s’établissent à 6,1 Md€ (inchangées depuis juillet 2022) ;
  • les charges liées aux gels des tarifs réglementés de vente d’électricité et de gaz naturel qui s’élèvent à + 3,0 Md€ (au lieu de 1,0 Md€ prévu en juillet 2022).

2023 est la première année pour laquelle les charges de service public de l’énergie à compenser aux opérateurs sont négatives. L’amplification de la hausse des prix de gros de l’énergie entraîne une réévaluation en forte hausse de la recette pour l’Etat en 2023. Cette hausse est principalement portée par le soutien aux énergies renouvelables en France métropolitaine continentale : les prix de gros de l’électricité sont devenus en moyenne supérieurs aux tarifs garantis par l’Etat dans les contrats de soutien aux énergies renouvelables.

La CRE prévoit, dans les conditions actuelles de prix de gros, que toutes les filières d’énergies renouvelables en métropole continentale représenteront des recettes pour le budget de l’Etat, pour une contribution cumulée, de 30,9 Md€ au titre de 2022 et 2023. La filière éolienne terrestre contribue majoritairement à cette recette, à hauteur de 21,7 Md€, la filière photovoltaïque à hauteur de 3,5 Md€ et la filière hydraulique à hauteur de 1,7 Md€. La filière du biométhane injectée y contribue également à hauteur de 0,9 Md€. La production prévisionnelle soutenue en 2023 s’établit à 69 TWh d’électricité et 12 TWh d’injection de biométhane.

Ainsi, dans le contexte actuel de crise des prix de gros, cette recette conséquente contribuera à financer, au moins en partie, les dépenses exceptionnelles liées aux mesures de protection des consommateurs annoncées par le Gouvernement telles que la prolongation en 2023 du bouclier tarifaire pour les consommateurs résidentiels et les TPE et les mesures complémentaires à destination des entreprises et des collectivités.

La CRE rappelle que les montants de charges prévisionnelles feront l’objet de régularisation in fine sur la base des charges constatées. Toutefois, le contexte de forte volatilité des prix de gros fait peser des risques sur les opérateurs, notamment en matière de trésorerie en cas de sous-compensations due à une éventuelle baisse des prix de gros. La CRE recommande fortement aux pouvoirs publics de prévoir, le cas échéant, des mesures de gestion ad hoc pour les opérateurs concernés.

Enfin, la CRE alerte sur le phénomène des résiliations anticipées des contrats de soutien par certains producteurs ENR. En juillet 2022, les demandes identifiées concernaient une puissance installée cumulée de 1,3 GW. A fin septembre 2022, ce volume dépasse les 3,7 GW. Cela représente une perte considérable pour le budget de l’Etat, de l’ordre de 6 à 7 Md€ cumulés pour les années 2022 et 2023, Ces installations n’ont pu être développées que grâce au soutien financier de l’Etat dont elles ont bénéficié sur des durées généralement supérieures à 10 ans. Il est tout à fait anormal que les producteurs concernés sortent des contrats garantis par l’Etat à quelques années de leur échéance pour profiter des prix de gros élevés. La CRE recommande donc de renforcer la mesure de taxation des rentes infra-marginales prévues par la réglementation européenne pour ces installations.

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