L'énergie du droit - numero 87

Actualité Électricité Gaz

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EN BREF

LES TEXTES 

Loi contre toutes les fraudes aux aides publiques

Evolutions des tarifs réglementés de vente de l’électricité au 1er août 2025

CRE : évaluation des charges de service public de l’énergie pour 2026 et réévaluation des charges de service public de l’énergie pour 2025

LE JUGE

Conseil d'Etat : rejet du recours de la société Eni contre la délibération de la CRE portant décision sur le tarif d’utilisation des réseaux de transport de gaz naturel pour la période 2024-2027 (ATRT8)

Conseil constitutionnel : censure des dispositions fixant la procédure de sanction applicable devant la formation restreinte de la CNIL

L’EUROPE

Commission européenne : proposition d’une cible climatique européenne pour 2040

ACER : approbation de la méthodologie d’évaluation des besoins de flexibilité

LA REGULATION

CoRDiS : sanction des sociétés Mint et BCM Energy, d'un montant respectif de 3,5 et 3 millions d'euros, pour abus du droit d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH)

ET AUSSICRE : bilan sur la mise en place du complément de rémunération en France

[Actualités de juillet/août 2025]

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LES TEXTES

Loi

Loi contre toutes les fraudes aux aides publiques 

La loi du 30 juin 2025, publiée le 1er juillet 2025, présente des mesures en matière de lutte contre les fraudes aux finances et aides publiques.

La loi introduit de nouvelles sanctions dans ce cadre : la suspension de l’octroi ou du versement d’une aide publique pour trois mois au maximum, en présence d'indices sérieux de manquement délibéré ou de fraude en vue d'obtenir l'octroi ou le versement de cette aide et la hausse des pénalités à payer par le bénéficiaire d'une aide publique qui l'a obtenue en fournissant des informations inexactes ou incomplètes.

En matière d’énergie, la loi présente une disposition spécifique concernant un dispositif de redressement en matière de constat et de sanction des destructions, des dégradations ou des détériorations légères des dispositifs de comptage de gaz naturel ou d’électricité par des agents agréés et assermentés du gestionnaire du réseau de distribution concerné. En matière de démarchage téléphonique, la loi interdit le démarchage non sollicité par téléphone, SMS, email ou via les réseaux sociaux dans le cadre de travaux énergétiques et d’adaptation des logements au handicap ou au vieillissement. Le texte prévoit d’étendre cette interdiction à tous les secteurs, à partir du 11 août 2026. 

Par ailleurs, en matière de rénovation énergétique, la loi renforce le cadre des dispositifs MaPrimeRénov’ et MaPrimeAdapt, des certificats d’économie d’énergie et du label RGE afin de prévenir les fraudes. 

Décisions

Evolutions des tarifs réglementés de vente de l’électricité au 1er août 2025

Cinq décisions en date du 25 juillet 2025 prises par les ministres en charge de l’économie et de l’énergie fixent les barèmes des tarifs réglementés de vente de l’électricité (TRVE) applicables à compter du 1er août 2025. Les cinq textes fixent respectivement les barèmes relatifs aux : 

  • TRVE applicables aux consommateurs résidentiels en France métropolitaine continentale ;
  • TRVE applicables aux consommateurs non résidentiels en France métropolitaine continentale ;
  • TRVE Jaunes et Verts applicables aux consommateurs en France métropolitaine continentale ;
  • TRVE applicables dans les zones non interconnectées au réseau métropolitaine continental ;
  • Tarifs de cession de l’électricité aux ELD ;
  • TRVE Jaunes et Verts applicables pour les consommateurs souscrivant une puissance supérieure à 36 kVA en France métropolitaine continentale.

Ces décisions sont conformes aux propositions formulées par la CRE dans ses délibérations du 19 juin 2025.

Décrets

Décret fixant les seuils d'assujettissement à l'obligation relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables pour les parcs de stationnement extérieurs situés en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique et à La Réunion

L'article 40 de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables impose l'installation d'ombrières comportant des dispositifs de production d'énergies renouvelables sur au moins la moitié de la superficie de parcs de stationnement qui ne sont pas en infrastructure ou en superstructure d'un bâtiment. 

Le décret du 11 août 2025 a pour objet de fixer, en application de cet article 40, les seuils d'assujettissement à cette obligation, c’est-à-dire la superficie des parcs de stationnement extérieurs dont le dépassement conduit à l’assujettissement à l’obligation de solarisation, pour les départements et régions de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de La Réunion. 

Les seuils applicables sont les suivants :

Modification des modalités de mise en œuvre du chèque énergie 

Le décret du 31 juillet 2025 adapte les dispositions réglementaires relatives à la mise en œuvre du chèque énergie, à la suite des évolutions introduites par loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025 (cf. L’Energie du droit n°82, février 2025). En premier lieu, les dispositions relatives aux critères d'éligibilité et à la constitution de la liste des bénéficiaires du chèque énergie sont modifiées. En deuxième lieu, le bénéfice du dispositif est étendu aux occupants de l'ensemble des logements-foyers, des logements en intermédiation locative et, sous condition de revenus, des établissements d’hébergement de personnes âgées. De plus, les textes suppriment la possibilité d'utiliser le chèque énergie pour les dépenses de rénovation énergétique des logements.

Par ailleurs, deux arrêtés du 31 juillet 2025 précisent respectivement les modalités de demande du chèque énergie et de transmission de données par les gestionnaires de réseaux publics de distribution d'électricité et les fournisseurs d'électricité à l'Agence de services et de paiement, et les critères d'éligibilité au chèque énergie et le plafond des frais de gestion pouvant être déduits de l'aide spécifique.

Principales délibérations de la CRE

Approbation des projets d’évolution de la procédure de raccordement et d’injection de NaTran

Par une délibération du 2 juillet 2025, la CRE approuve les projets d’évolution de la procédure de raccordement et les conditions générales du contrat de raccordement et d’injection dans son réseau de transport de gaz pour les installations de production de gaz soumis par NaTran.

Cette nouvelle version de la procédure de raccordement et des conditions générales du contrat de raccordement et d’injection prend notamment en compte le changement de dénomination sociale de NaTran et l'extension du périmètre contractuel à l'ensemble des gaz renouvelables et bas-carbone. Les contrats de raccordement et d’injection signés par NaTran devront être conformes aux conditions générales validées par la CRE, dès lors que NaTran aura publié ces conditions sur son site internet, au plus tard le 1er août 2025.

Approbation de la proposition de RTE de modifier l’acquisition et l’échange de capacités de réserve primaire

Par une délibération du 3 juillet 2025, la CRE approuve une proposition de modification relative à l’acquisition et à l’échange de capacités de réserve primaire. Cette proposition a été soumise à la CRE par RTE en application du règlement (UE) 2017/2195 du 23 novembre 2017 concernant une ligne directrice sur l’équilibrage du système électrique, au titre duquel les gestionnaires de réseaux de transport « responsables de l'élaboration d'une proposition de modalités et conditions ou de méthodologies […] peuvent demander des modifications » des règles communes pour la contractualisation de réserve primaire.

RTE suggère une évolution au 1er janvier 2026 des modalités de rémunération ex-post des capacités de réserve primaire échangées entre gestionnaires de réseaux de transport d’électricité de la Coopération FCR (« Frequency Containment Reserve » ou encore « réserve primaire »). Après consultation des autorités de régulation concernées, la CRE approuve la proposition d’amendement des règles et processus communs et harmonisés pour l'acquisition et l'échange de capacités de réserve primaire. 

Reconduction des membres du conseil de surveillance de RTE 

RTE a notifié à la CRE sa proposition de reconduction de Monsieur Philippe Bajou, Madame Florence Brillaud-Claveranne, Madame Virginie Chapron-du Jeu, Monsieur Arthur Faust et Madame Catherine Mayenobe, en qualité de membres de la minorité au sein du conseil de surveillance de RTE, pour une durée de 5 ans à compter du 1er septembre 2025. Après examen des conditions d’indépendance attachées à leur fonction, la CRE approuve ces reconductions par une délibération du 10 juillet 2025. 

Evaluation des charges de service public de l’énergie pour 2026 et réévaluation des charges de service public de l’énergie pour 2025

Par une délibération du 10 juillet 2025, la CRE réalise une réévaluation des charges de service public de l’énergie pour 2025 en application de la loi de finances pour 2025. Ces charges s’établissent désormais à 10,9 Mds€, en hausse par rapport à l’évaluation réalisée en juillet 2024. Cette augmentation est principalement portée par une baisse des prix de marché plus importante qu’estimée initialement. 

Du fait de cette baisse des prix de marché, les charges liées au soutien aux énergies renouvelables et à la cogénération au gaz naturel en France hexagonale au titre de 2025 (6,9 Mds€) reviennent à un niveau de l’ordre de celui constaté au titre de 2020 avant la crise (6,4 Mds€). 

La CRE procède également à l’évaluation annuelle des charges pour l’année 2026, qui s’élèvent à 12,94 Mds€ dont 9,7 Mds€ à compenser par le budget de l’Etat et 3,25 Mds€ par une part de l’accise. 

Dans sa délibération, la CRE décrit également ses travaux en cours pour améliorer la prévisibilité des charges de service public de l’énergie. 

Approbation de la proposition de modèle de contrat d’accès aux réseaux publics de distribution soumise par 94 entreprises locales de distribution

Par une délibération du 16 juillet 2025, la CRE approuve le modèle de contrat d’accès aux réseaux publics de distribution (CARD) pour une installation de production raccordée en HTA (« CARD-I HTA ») en France métropolitaine continentale soumis par 94 entreprises locales de distribution (ELD) de moins de 100 000 clients. En effet, la CRE a adopté le 6 février 2025 un modèle commun de CARD-I HTA qui doit être suivi par chacun des gestionnaires de réseaux publics de distribution d’électricité lors de l’élaboration de leur nouveau modèle de CARD-I HTA applicable en France métropolitaine continentale. 

Le nouveau modèle s’applique aux contrats en cours à compter du 20 octobre 2025. Conformément à la délibération de la CRE du 6 février 2025, les conditions particulières transmises aux utilisateurs devront être personnalisées au préalable par le gestionnaire de réseaux de distribution.

Bilans d’exécution des programmes d’investissements 2024 et approbation des programmes d’investissements 2025 révisés de Géométhane, NaTran, Teréga stockage, Teréga transport et Storengy

Par quatre délibérations en date des 9 et 17 juillet 2025, la CRE dresse le bilan des dépenses 2024 définitivement arrêtées de Géométhane, NaTran, Storengy, Teréga stockage et Teréga transport en début d’année 2025 et approuve le programme d’investissements 2025 révisé afin de prendre en compte les ajustements intervenus depuis son approbation.

Encadrement du guichet de septembre 2025 relatif à la mise à jour des déclarations de charges pour le dispositif d’amortisseur 2024

Par sa délibération du 17 juillet 2025, la CRE précise les modalités relatives au guichet complémentaire obligatoire de septembre 2025 portant sur la déclaration des charges de service public de l’énergie (CSPE) au titre des amortisseurs 2024 prévu par l’article 225 de la loi de finances pour 2024.

Tous les fournisseurs d’électricité ayant remis à la CRE avant le 31 mars 2025 un dossier de demande de compensation au titre des amortisseurs 2024 dans le cadre des déclarations de CSPE doivent obligatoirement remettre à la CRE une nouvelle déclaration de charges avant le 30 septembre 2025.

La délibération précise les modalités opérationnelles de déclaration et les documents à transmettre par les fournisseurs au guichet additionnel de septembre 2025 et évoque les contrôles de cohérence qui seront réalisés par la CRE.

Approbation de la nouvelle procédure de traitement des demandes de raccordement au réseau public de transport d’électricité

Par une délibération du 23 juillet 2025, la CRE approuve la nouvelle procédure de traitement de demandes de raccordement au réseau public de transport d’électricité proposée par RTE. Les évolutions concernent notamment :

  • la création d’une procédure commune pour les installations de production, de stockage, de consommation et les sites mixtes ;
  • l’intégration des modalités spécifiques au traitement des raccordements mutualisés de consommateurs tels que prévus par les articles L. 342-2 et L. 342-18 du code de l’énergie et la délibération n°2024-200 de la CRE du 7 novembre 2024 (cf. L’Energie du droit n°79, novembre 2024) ;
  • l’intégration des modalités relatives au dispositif de modification de la puissance de raccordement prévu par l’article L. 342-24 du code de l’énergie ainsi que les dispositions prévues dans la délibération n°2024-229 de la CRE du 18 décembre 2024 relative à ce dispositif (cf. L’Energie du droit n°80, décembre 2024) ;
  • l’intégration d’incitations au bon dimensionnement de la demande de raccordement et à l’avancement des projets ;
  • la définition d’une procédure simplifiée pour le raccordement des petites unités de production ou de stockage.

Approbation de deux nouveaux modèles de contrats d’accès au réseau public de transport d’électricité 

Par deux délibérations en date du 23 juillet 2025, la CRE approuve les modifications apportées à des modèles de contrats d’accès au réseau :

  • le nouveau modèle de convention de raccordement d’une installation de consommation avec ou sans production ou stockage au réseau public de transport d’électricité : ce modèle apporte des évolutions concernant notamment i) l’intégration des modalités spécifiques au traitement des raccordements mutualisés de consommateurs et ii) l’intégration des modalités relatives au dispositif de modification de la puissance de raccordement ainsi qu’une simplification contractuelle ;
  • le nouveau modèle de contrat d’accès au réseau public de transport d’électricité proposé par RTE pour les consommateurs (« CART-C ») : ce nouveau modèle intègre les modalités relatives au dispositif de modification de puissance de raccordement, les modalités relatives aux installations de production et/ou de stockage raccordées au réseau public de transport via une installation de consommation ainsi que les évolutions permettant la simplification de sa relation contractuelle avec ses clients.

Dérogation de trois ans accordée à RTE pour la réduction de sa fenêtre opérationnelle

La réforme du marché de l’électricité européen adoptée en juillet 2024 prévoit une harmonisation au 1er janvier 2026 de l’heure limite de fermeture des échanges aux frontières via le marché infrajournalier, à 30 minutes avant le temps réel. Jusqu’à présent, RTE prenait la main dans sa « fenêtre opérationnelle » à partir de 60 minutes avant le temps réel.

Aux termes de la règlementation européenne, les gestionnaires de réseau de transport peuvent demander à leur régulateur national une dérogation allant jusqu’à trois années pour la mise en œuvre de cette évolution.

En considérant les analyses d’impacts et le plan d’action proposés par RTE, ainsi que les retours des acteurs de marché sur ces éléments, la CRE octroie à RTE, par une délibération du 23 juillet 2025, une dérogation de trois ans pour la mise en œuvre de cette évolution, soit une réduction de la fenêtre opérationnelle à compter du 1er janvier 2029.

Approbation des règles de marché harmonisées relatives à la valorisation explicite des effacements et de leurs dispositions générales 

Par une délibération du 23 juillet 2025, la CRE approuve les règles NEBCO ("Notification d'Echange de Bloc de Consommation") qui remplacent les règles NEBEF ("notification d’échange de blocs d’effacement") et qui entrent en vigueur le 1er septembre 2025. Cette nouvelle version vise à introduire un cadre pour la valorisation des reports et des anticipations de consommation liés aux effacements, afin d'inciter les consommateurs à décaler leurs consommations aux périodes de prix les plus favorables.

Depuis 2024, les besoins de flexibilité à la hausse du système électrique français sont très importants, notamment au printemps et à l’été avec des périodes fréquentes et prolongées de prix négatifs ou voisins de zéro. Dans ce contexte, la possibilité de valoriser, dans le cadre existant des effacements, des reports ou anticipations de consommation, constitue un outil supplémentaire de flexibilité au service du système électrique.

Ces règles NEBCO permettent aussi aux opérateurs d'effacement de mesurer les modulations de consommation des sites profilés via une nouvelle méthode développée par Enedis, dite méthode des panels, qui compare la consommation des sites pilotés à la consommation d'un panel de sites représentatifs.

LE JUGE

Conseil constitutionnel 

Censure des dispositions fixant la procédure de sanction applicable devant la formation restreinte de la CNIL en ce qu’elles ne prévoient pas la notification à la personne mise en cause de son droit de se taire

Par une décision du 8 août 2025, le Conseil constitutionnel censure les dispositions de l’article 22 de la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 fixant la procédure de sanction applicable devant la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) en ce qu’elles ne prévoient pas la notification à la personne mise en cause de son droit de se taire. 

Le Conseil constitutionnel rappelle, d’abord, que le droit de se taire découle du principe, garanti à l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, selon lequel nul n’est tenu de s’accuser et que ces exigences s’appliquent à toute sanction ayant le caractère d’une punition. A cet égard, il relève que les articles 20 et 21 de la loi du 6 janvier 1978 déterminent les mesures pouvant être décidées par la CNIL à l’encontre des responsables de traitement de données ou de leurs sous-traitants en cas de manquement à leurs obligations et qu’au nombre d’entre elles, figurent des amendes administratives constituant des sanctions ayant le caractère d’une punition. 

Examinant, ensuite, les conditions dans lesquelles la formation restreinte de la CNIL peut prononcer de telles sanctions, il souligne que les dispositions de l’article 22 de la loi du 6 janvier 1978 se bornent à prévoir que la personne mise en cause peut présenter des observations en réponse au rapport qui lui est notifié et qu’elle peut être entendue par la formation restreinte si celle-ci le juge utile. Aucune disposition législative ne prévoit ainsi que la personne mise en cause est informée de son droit de se taire. Pourtant, dans ces deux situations, la personne mise en cause peut, selon le Conseil constitutionnel, être amenée à reconnaître les manquements qui lui sont reprochés et à croire qu’elle ne dispose pas du droit de se taire. 

Par conséquent, le Conseil constitutionnel juge qu’en ne prévoyant pas que la personne mise en cause – qu’il s’agisse d’une personne physique ou du représentant légal d’une personne morale – doit être informée de son droit de se taire devant la formation restreinte de la CNIL, les dispositions de l’article 22 de la loi du 6 janvier 1978 méconnaissent les exigences de l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et sont ainsi contraires à la Constitution.

Conseil d’Etat

Absence de méconnaissance du principe d’individualisation des peines en cas de modulation possible des modalités de publication d’une décision de sanction

Par une décision du 8 juillet 2025, le Conseil d’Etat rejette les recours formés contre une décision de sanction rendue par la formation restreinte du Haut conseil du commissariat aux comptes (H3C), devenu Haute autorité de l’audit (H2A). 

Après avoir rappelé que le principe de nécessité des peines découlant de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 implique qu’une sanction administrative ayant le caractère d’une punition ne puisse être appliquée que si l’autorité compétente la prononce expressément en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce, le Conseil d’Etat juge que les dispositions de l’article L. 824-13 du code de commerce relatif aux modalités de publication des décisions de sanction ne méconnaissent pas le principe d’individualisation des peines. 

En effet, si ces dispositions fixent le principe de la publication, pendant une durée minimale, de la décision de sanction sur le site internet de l’autorité, notamment à des fins d’information des tiers, elles ouvrent la possibilité à l’autorité de prendre compte des circonstances propres à chaque espèce et soit d’amplifier la publicité de la sanction, en étendant la durée d’affichage sur le site internet ou en la faisant publier dans divers supports, soit de la réduire en la publiant sous forme anonymisée lorsque la publication de la décision est susceptible de causer à la personne sanctionnée un préjudice grave et disproportionné. 

Droit de se taire et possibilité de tenir compte dans le quantum de la sanction prononcée du degré de coopération de l’intéressé

Par une décision du 24 juillet 2025, le Conseil d’Etat rappelle que, si le principe selon lequel nul n’est tenu de s’accuser, dont découle le droit de se taire, garanti par l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, ne s’applique pas lors des enquêtes diligentées antérieurement à la notification des griefs, il implique qu’une personne à l’encontre de laquelle est engagée une procédure susceptible d’aboutir au prononcé d’une sanction administrative ne puisse être entendue sur les manquements qui lui sont reprochés sans avoir été préalablement informée du droit qu’elle a de se taire. Il précise qu’à ce titre, elle doit être avisée, avant d’être entendue pour la première fois, qu’elle dispose de ce droit pour l’ensemble de la procédure de sanction. 

Il rappelle également que, dans le cas où l’information du droit de se taire n’a pas été délivrée à la personne mise en cause, une telle irrégularité n’est susceptible d’entraîner l’annulation de la sanction prononcée que si celle-ci repose de manière déterminante sur les déclarations de la personne mise en cause. 

Par ailleurs, il juge que les dispositions de l’article L. 824-12 du code de commerce, applicables à la procédure de sanction devant le Haut conseil du commissariat aux comptes (H3C), devenu Haute autorité de l’audit (H2A), doivent être interprétées en ce sens que le degré de coopération dont a fait preuve la personne intéressée dans le cadre d’une enquête, peut être pris en compte en vue d’atténuer la sanction prononcée à son encontre. Au cas présent, il en déduit que la formation restreinte du H3C a pu retenir à bon droit que l’attitude de l’intéressé, qui avait refusé de répondre à l’essentiel des questions qui lui avaient été posées au cours de l’enquête, n’apparaissait pas de nature à permettre d’atténuer les sanctions prononcées. 

Rejet du recours de la société Eni contre la délibération de la CRE portant décision sur le tarif d’utilisation des réseaux de transport de gaz naturel pour la période 2024-2027 (ATRT8)

Par une décision du 25 juillet 2025, le Conseil d’Etat rejette la requête de la société Eni tendant à l’annulation de la délibération n° 2024-22 de la CRE du 30 janvier 2024 portant décision sur le tarif d’utilisation des réseaux de transport de gaz naturel de GRTgaz et Teréga (ATRT8). 

En ce qui concerne l’exigence de transparence, prévue à l’article 13 du Règlement (CE) n° 715/2009 du 13 juillet 2009 concernant les conditions d’accès aux réseaux de transport de gaz naturel et à l’article L. 452-1 du code de l’énergie, le Conseil d’Etat considère que la délibération est exempte de toute critique dès lors que, contrairement à ce qui est soutenu par la société requérante, la CRE a exposé de manière détaillée la méthode de calcul des tarifs appliquée à l’entrée et à la sortie du réseau principal de transport de gaz, présenté un modèle simplifié de cette méthode, expliqué les modalités d’application et de calcul des scénarios de flux, recouru à des paramètres en lien avec les caractéristiques techniques du réseau de transport et justifié des motifs l’ayant conduite à appliquer cette méthode plutôt que la méthode standard. Il ajoute, à cet égard, que la CRE, qui n’était pas tenue de se conformer aux observations formulées par les acteurs de marché dans le cadre de la consultation publique préalable à l’adoption de la délibération attaquée, a fait état de ces observations et y a répondu de manière détaillée. 

En ce qui concerne l’exigence de reproductibilité du calcul des tarifs résultant de l’article 7 du Règlement (UE) 2017/460 du 16 mars 2017 établissant un code de réseau sur l’harmonisation des structures tarifaires pour le transport du gaz, le Conseil d’Etat juge que la délibération attaquée et ses annexes explicitent la méthode de calcul des tarifs retenue et mentionne l’ensemble des paramètres permettant, comme l’avait relevé l’Agence de coopération des régulateurs de l’énergie (ACER), aux utilisateurs du réseau principal de reproduire et prédire le calcul des tarifs. Il précise que, conformément à l’article 41, § 16, de la directive 2009/73/CE du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel, la délibération attaquée pouvait valablement ne pas mentionner les paramètres de distance et les hypothèses de capacités retenues à certains points du réseau dans la mesure où de telles données constituent des informations dont la confidentialité est justifiée par l’exigence de protection de la sécurité du réseau et par le secret des affaires. Il écarte, en conséquence, le moyen tiré de la méconnaissance de l’exigence de reproductibilité des tarifs. 

En ce qui concerne l’exigence de non-discrimination entre les utilisateurs domestiques et les utilisateurs de transit, il relève, en substance, que la méthode d’appariement utilisée par la CRE est appliquée de manière identique à tous les utilisateurs du réseau principal, indépendamment de la catégorie, transfrontalière ou régionale, des points de sortie du réseau principal. Le Conseil d’Etat en déduit que le moyen tiré de ce que les utilisateurs en transit seraient traités de manière défavorable par rapport aux utilisateurs domestiques n’est pas fondé. 

Enfin, le Conseil d’Etat estime que les scénarios de flux et l’égalisation du coût unitaire de transport au kilomètre pour les utilisateurs domestiques et en transit ont été mis en œuvre dans le respect, respectivement, des articles 3(20), et 7 du Règlement 2017/460.

L'EUROPE

Commission européenne

Proposition d’une cible climatique européenne pour 2040 

La Commission européenne a présenté le 2 juillet 2025 sa proposition législative modifiant le Règlement (UE) 2021/1119 du 30 juin 2021 établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique. L’article 2 de ce texte européen sur le climat prévoit un objectif de neutralité climatique en 2050 tandis que l’article 4 fixe un objectif de réduction de 55 % des émissions nettes de gaz à effet de serre en 2030. La Commission propose la fixation d’un objectif contraignant intermédiaire pour 2040 de diminution de 90 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990. 

La proposition prévoit que l’atteinte de cet objectif impliquera de mobiliser toutes les solutions énergétiques à émissions de carbone faibles ou nulles comprenant les énergies renouvelables, le nucléaire, l’efficacité énergétique, le stockage, les capacités de capture et de stockage ou d’utilisation du carbone, les absorptions de carbone, la géothermie, l’hydro-énergie et toutes les technologies énergétiques « zéro net » actuelles ou futures. La proposition pose le principe de la neutralité technologique pour atteindre les objectifs fixés. A partir de 2036, une éventuelle participation limitée des crédits carbone internationaux, correspondant à 3 % des émissions nettes de l’Union en 1990, pourra contribuer à la réalisation de l’objectif pour 2040 

Publication de l’acte délégué définissant l’hydrogène bas-carbone 

La Commission européenne a publié le 8 juillet 2025 un acte délégué sur l’hydrogène bas carbone en application de la Directive (UE) 2024/1788 du 13 juin 2024 concernant des règles communes pour les marchés intérieurs du gaz renouvelable, du gaz naturel et de l’hydrogène. Celui-ci établit une méthodologie pour calculer les émissions de carbone de l’hydrogène et des carburants connexes afin d’être considérés comme bas carbone. Ces émissions doivent être d’au moins 70 % inférieures à celles issues de la combustion de sources fossiles sans dispositif d’atténuation. Après examen par le Parlement européen et le Conseil, le Règlement s’appliquera d’ici la fin d’année 2025. 

L’hydrogène produit par vaporeformage à partir de gaz naturel dans le cadre d’un procédé associé à un système de captage et de stockage du carbone est considéré comme bas-carbone, comme l’hydrogène produit à partir d’électricité considérée comme bas carbone. La Commission européenne retient une méthode prenant en compte la diversité des mix énergétiques des Etats membres. 

Celle-ci s’engage à évaluer d’ici le 1ᵉʳ juillet 2028 l'impact de voies alternatives à ce règlement, notamment en considérant l'électricité bas carbone provenant de centrales nucléaires, sur la base de critères et d'approches appropriés prenant en compte l'intensité des émissions de gaz à effet de serre de l'électricité en fonction de moyennes ainsi que la possibilité d'introduire une approche spécifique à chaque pays ou région pour les valeurs standard des intensités d'émission de gaz à effet de serre des intrants pour l’hydrogène bleu.

Règles sur les obligations de stockage de CO₂ des grands producteurs européens de gaz et de pétrole 

La Commission européenne a publié le 25 juillet un Règlement délégué (UE) 2025/1477 du 21 mai 2025 afin de préciser les règles régissant le recensement des producteurs de pétrole et de gaz autorisés tenus de contribuer à l’objectif de capacité d’injection de CO2 disponible à l’échelle de l’Union européenne (UE) d’ici à 2030, le calcul de leurs contributions respectives et leurs obligations de déclaration. Ce Règlement fixe des obligations de stockage de CO₂ pour ces producteurs et complète le Règlement (UE) 2024/1735 du 13 juin 2024 relatif à l’établissement d’un cadre de mesures en vue de renforcer l’écosystème européen de la fabrication de produits de technologie « zéro net » (NZIA). 

Ce Règlement délégué fixe au niveau de l’UE un objectif de capacité d’injection de CO2 à l’échelle de l’Union d’ici à 2030 de 50 millions de tonnes par an. Il prévoit une exception à la contribution à l’objectif de stockage pour les entreprises qui ont produit moins de 610 000 tonnes équivalent pétrole de gaz naturel et de pétrole brut entre 2020 et 2023, et dont la production représente moins de 5 % de la production totale de l’UE. 

Par une décision (UE) 2025/1479 du 22 mai 2025, la Commission européenne a précisé la liste des 44 entreprises assujetties et leur obligation de contribution à la capacité opérationnelle d’injection de CO2 d’ici à 2030. 

Publication de la liste des produits finis et composants spécifiques pour les technologies « zéro net »

La Commission européenne a publié le 28 juillet 2025 le Règlement délégué (UE) 2024/1735 du 23 mai 2025 recensant les sous-catégories dans les technologies « zéro net » et la liste des composants spécifiques utilisés pour ces technologies complétant le règlement (UE) 2024/1735 du 13 juin 2024 relatif à l’établissement d’un cadre de mesures en vue de renforcer l’écosystème européen de la fabrication de produits de technologie « zéro net » (NZIA). 

Elle a réalisé une évaluation complète et fondée sur une analyse méthodologique des chaînes d’approvisionnement des technologies « zéro net » qui a notamment tenu compte de la disponibilité commerciale des composants, du niveau de détail approprié et de l’évolution des technologies. Afin de recenser les composants spécifiques considérés comme étant principalement utilisés pour la production de technologies « zéro net », quatre critères ont été appliqués dans l’évaluation, à savoir leur nature spécifique, leur disponibilité commerciale, le fait qu’ils sont toujours principalement utilisés pour cette production et leur caractère essentiel.

En annexe figure la liste des technologies concernées comprenant notamment les technologies solaires, les technologies éoliennes terrestres et renouvelables en mer, les technologies de batterie et technologies de stockage de l’énergie, les pompes à chaleur et technologies géothermiques, les technologies de l’hydrogène, les technologies durables de biogaz et de biométhane, les technologies de capture et de stockage du carbone, les technologies des réseaux électriques, les technologies de l’énergie nucléaire de fission. 

Aides d’Etat : résumé des décisions des mois de juillet et août 2025

La Commission européenne a rendu deux décisions approuvant des régimes d’aides d’Etat dans le secteur de l’énergie aux mois de juillet et août 2025 : 

  • Autorisation d’un régime suédois d’un montant de 300 millions d’euros soutenant un mécanisme de capacité constitué sous la forme d’une réserve stratégique (29 juillet 2025, SA.112968) : ce mécanisme de capacité effectif jusqu’en 2035, rémunèrera des ressources maintenues hors marché pour être utilisées lorsque la demande en électricité excède l'offre disponible et sera accessible à tous les projets remplissant l'objectif de sécurité d'approvisionnement, englobant la production d'électricité, la gestion de la demande et le stockage. Les aides seront versées à la suite d’un appel d'offres transparent et non-discriminatoire.
  • Autorisation d’un régime français d’un montant de 11 milliards d’euros soutenant la construction et l’exploitation de trois parcs éoliens flottants au sud de la Bretagne et en mer Méditerranée (5 août 2025, SA.115764) : le régime qui a une durée de 20 ans a été considéré conforme aux conditions énoncées dans l'encadrement des aides d'État « CISAF » adopté par la Commission le 25 juin 2025. Les aides seront octroyées sur la base d'une procédure d'appel d'offres transparente et non discriminatoire par zone et prendront la forme d'une prime mensuelle variable au titre d'un contrat sur différence bidirectionnel. La résilience figurait parmi les critères de préqualification et d'attribution en vue de diversifier les chaînes d'approvisionnement des éoliennes et des principaux composants spécifiques afin de réduire la dépendance à l'égard des importations.

Les détails de ces décisions de la Commission européenne n’ont pas tous été rendus publics et seront consultables ultérieurement dans le registre des aides d’Etat.

Agence de Coopération des Régulateurs de l’Energie (ACER)

Avis sur la cohérence des plans de développement des réseaux de transport d’électricité 

L’ACER a publié le 22 juillet 2025 un avis relatif à la cohérence des plans nationaux de développement des réseaux de transport d’électricité, élaborés par les gestionnaires de réseaux de transport d’électricité nationaux, avec le plan décennal de développement de ces réseaux au niveau européen élaboré par le Réseau européen des gestionnaires de réseau de transport d’électricité (ENTSO-E). L’ACER est chargée d’évaluer tous les deux ans la cohérence entre ces documents et d’identifier les voies d’améliorations. 

Elle conseille aux gestionnaires des réseaux de transport d'électricité nationaux de mieux synchroniser leurs calendriers pour les plans nationaux avec ceux à l'échelle européenne, sur un cycle biennal. Elle préconise également d'améliorer la collaboration avec les gestionnaires de réseaux de distribution, de réaliser des consultations publiques sur les premières versions des plans, et de mener des consultations plus spécifiques sur les scénarios de planification et les analyses coûts-avantages. Elle insiste sur l'importance d'augmenter la transparence des coûts d'investissement des projets. L'ACER propose en plus de renforcer le rôle des régulateurs nationaux en leur donnant le droit d'approuver formellement les plans nationaux et d'intégrer les projets non gérés par les gestionnaires de réseaux de transport dans le processus de planification.

Approbation de la méthodologie d’évaluation des besoins de flexibilité 

L’ACER a approuvé le 25 juillet 2025 la proposition conjointe du Réseau européen des gestionnaires de réseaux de transport d’électricité (ENTSO-E) et de l’Association européenne des gestionnaires de réseau de distribution d’électricité (EU DSO Entity) en ce qui concerne le type de données et le format, ainsi que la méthode relative à l'analyse à fournir en ce qui concerne les besoins de flexibilité conformément à l'article 19 sexies, paragraphe 6, du Règlement (UE) 2019/943 du 5 juin 2019 sur le marché intérieur de l’électricité. 

Cette méthodologie sera utilisée au niveau national pour identifier les besoins en flexibilités non fossiles. Elle distingue les besoins de flexibilité du réseau, qui reflète la flexibilité nécessaire pour s'adapter à la disponibilité du réseau, de la flexibilité du système, qui fait référence à la capacité du système électrique à ajuster à la fois la production et la consommation d'électricité en réponse aux signaux du marché. La méthodologie d'évaluation des besoins de flexibilité fournit une approche harmonisée pour les gestionnaires de réseaux de transport et de distribution au regard des données qu'ils doivent collecter et de la manière dont ils doivent évaluer leurs besoins nationaux de flexibilité électrique.

Chaque État membre doit désormais réaliser une évaluation nationale des besoins de flexibilité en utilisant la nouvelle méthodologie pour la soumettre à l'ACER et à la Commission européenne d'ici juillet 2026. D’ici à janvier 2027, les Etats membres devront utiliser les résultats pour définir leurs objectifs nationaux en matière de flexibilité non fossile. L'ACER publiera d’ici juillet 2027 un rapport à l'échelle européenne pour estimer les besoins de flexibilité.

Recommandation sur la répartition intertemporelle des coûts des gestionnaires de réseaux d’hydrogène 

L’ACER a publié le 29 juillet 2025 sa première recommandation sur les mécanismes de répartition intertemporelle des coûts pour le financement des infrastructures d'hydrogène. Ces recommandations sont publiées sur le fondement du règlement sur l'hydrogène et les gaz décarbonés (UE) 2024/1789 du 13 juin 2024 qui accorde aux États membres la possibilité d'autoriser les exploitants de réseaux d'hydrogène de recouvrer les coûts de développement des infrastructures progressivement grâce à des mécanismes de répartition intertemporelle des coûts. 

L’ACER délivre des conseils sur la conception de mécanismes équitables et efficaces de répartition intertemporelle des coûts pour soutenir le développement du marché de l'hydrogène. Elle souligne la nécessité pour les États membres d'établir rapidement des cadres réglementaires clairs pour l'hydrogène et de développer des règles nationales flexibles pour s'adapter aux futurs codes de réseau européens pour l’hydrogène.

Lettre d’information trimestrielle n° 41 de l’ACER relative à REMIT

L’ACER a publié, le 8 août 2025, la 41ème lettre d’information trimestrielle relative au REMIT couvrant le deuxième trimestre 2025. Cette édition met en valeur le lancement des outils de transparence que sont le Centre de référence des données REMIT et le Point d’accès aux informations privilégiées introduits en mai 2025. 

Le rapport comporte notamment des articles concernant :

  • les travaux préparatoires en cours de l’ACER sur la communication des données à la suite du REMIT révisé et en attendant la finalisation du règlement d’exécution de REMIT ;
  • les principaux points à retenir des réunions de groupes d’experts d’avril et de mai sur la communication des données et sur l’intégrité et la transparence du marché de gros de l’énergie ;
  • une mise à jour sur la surveillance de marché et des statistiques sur 416 cas de violations du REMIT en cours d’examen à la fin du deuxième trimestre ;
  • un résumé de l’activité du marché, montrant une augmentation d’une année sur l’autre des échanges sur les places de marchés organisés, tirée par la croissance des marchés à terme du gaz naturel. 

Approbation par l’ACER de l’évaluation de l’adéquation des ressources européennes (ERAA) 2024

L'ACER a approuvé le 14 août 2025 l'évaluation européenne de l'adéquation des ressources de 2024 (ERAA 2024) proposée par le Réseau européen des gestionnaires de réseaux de transport d'électricité (ENTSO-E). La prochaine ERAA devrait être publiée selon l’ACER en novembre 2025. 

S’agissant de l’ERAA 2024, l’ACER confirme que l'ERAA est un outil fiable pour surveiller l'adéquation des ressources électriques et met en évidence la manière dont les pénuries dans un État membre peuvent en affecter d’autres et souligne l’importance de la solidarité régionale, en montrant la valeur de la coopération transfrontalière. Elle relève les efforts réalisés pour se conformer à sa méthodologie ERAA et note des améliorations :

  • une estimation plus robuste des capacités interzonales à l’aide d’une méthode de calcul basée sur les flux ;
  • une sélection plus représentative des scénarios météorologiques ;
  • un alignement plus étroit avec les Plans nationaux en matière d’énergie et de climat (PNEC) pour les hypothèses relatives aux énergies renouvelables.

L’ACER formule des suggestions pour encore améliorer les prochaines évaluations :

  • réduire l'écart de cohérence entre les modules d'investissement et d'adéquation de l'ERAA ;
  • améliorer la transparence des hypothèses nationales en expliquant les principaux facteurs qui sous-tendent les estimations (en particulier pour la demande) ;
  • dans les prochaines éditions de l'ERAA, expliquer ce qui a changé par rapport à l'édition précédente, afin de permettre aux parties prenantes de suivre les évolutions.

Enfin, l’ACER recommande, pour les prochaines éditions, une évaluation complète des marchés de capacité existants pour contribuer à l'initiative « fast track » de la Commission européenne visant à rationaliser le processus d'approbation des mécanismes de capacité.

LA REGULATION

Comité de Règlement des Différends et Sanctions (CoRDiS)

Sanction des sociétés Mint et BCM Energy pour abus de droit d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH)

Dans le cadre de ses missions visant à veiller au bon fonctionnement du marché de détail de l’électricité et à garantir une protection effective des consommateurs, la CRE a ouvert deux enquêtes, fin 2022 et début 2023, sur les pratiques de la société Mint et sur celles des sociétés BCM Energy et Oui Groupe (devenue Elmy Groupe) pour des suspicions d’abus de droit d’ARENH. A l’issue de ces enquêtes, la Présidente de la CRE a saisi le CoRDiS de deux demandes de sanction au mois d’octobre 2023.

Par une décision du 3 juillet 2025, le CoRDiS a infligé une sanction pécuniaire de 3,5 millions d’euros à la société Mint et une sanction pécuniaire de 3 millions d’euros à la société BCM Energy pour avoir commis, chacune, un abus du droit d’ARENH au cours des années 2021 et 2022, après avoir mis hors de cause la société Elmy Groupe, société mère de la société BCM Energy.

Différend relatif à la modification du raccordement au réseau public de distribution d’électricité d’une installation de consommation d’électricité

Le CoRDiS s’est prononcé, par une décision du 16 juillet 2025, sur une demande de règlement de différend concernant la modification du raccordement au réseau public de distribution d’électricité d’une installation de consommation d’électricité.

M. P. a saisi le comité à la suite d’une demande de raccordement qu’il avait effectuée auprès d’Enedis. Enedis lui avait transmis une proposition de travaux de modification du branchement du local d’habitation mettant à sa charge la somme de 2 286,00 euros TTC et prévoyant, notamment, la réalisation d’un branchement de type 2 impliquant la modification de l’emplacement du compteur, situé jusqu’alors au sein de son local d’habitation. En réponse à une recommandation du Médiateur national de l’énergie (MNE), Enedis a indiqué accepter de prendre en charge les coûts de l’opération mais a indiqué être dans l’impossibilité de procéder au branchement de type 1 demandé par M. P., compte tenu de la longueur séparant le coupe-circuit principal individuel (CCPI) du point de livraison de l’installation de consommation.

Au cours de l’instruction du différend, il est apparu que M.P. était lui-même à l’origine de la nécessité de modifier le raccordement au réseau public de distribution de son installation de consommation, après avoir, en tant que coindivisaire, accepté de céder une partie de la parcelle sur laquelle se trouvait les ouvrages de raccordement, créant ainsi une situation d’emprise pour le passage desdits ouvrages sur le terrain voisin. C’est au regard de ces éléments, inconnus jusqu’alors du gestionnaire du réseau de distribution, que ce dernier est revenu, au cours de l’instruction, sur sa proposition de prendre en charge le coût du raccordement. 

Le comité considère en premier lieu qu’il ne ressort d’aucun texte ni d’aucune règle qu’il incomberait au gestionnaire du réseau public de distribution de suivre l’évolution juridique et cadastrale des terrains que traversent les ouvrages de raccordement au réseau public de distribution. Le demandeur n’est, dès lors, pas fondé à soutenir que la nécessité de modifier les ouvrages de raccordement était issue de la carence d’Enedis et qu’il ne pouvait pas lui être imposé un raccordement de type 2.

En second lieu, concernant l’emplacement du compteur prévu dans la proposition de raccordement transmise par Enedis au demandeur, le comité rappelle que, si la norme NFC 14-100 n’est plus d’application obligatoire, il n’en demeure pas moins que les ouvrages de raccordement doivent être conçus et réalisés selon une norme qui doit permettre d’atteindre le même niveau de sécurité à l'échelle de l'installation électrique et du bâtiment. Il en conclut que c’est sans méconnaître les conditions techniques en vigueur qu’Enedis a indiqué au demandeur être dans l’impossibilité de réaliser un branchement de type 1 en raison de la distance supérieure à 30 mètres entre le CCPI et le point de livraison de l’installation de consommation.

Enfin, concernant la prise en charge du coût de l’opération, le comité rappelle les dispositions réglementaires prévoyant que, lorsque la modification demandée par l’utilisateur du réseau entraîne des travaux sur les ouvrages constitutifs de son raccordement, ils donnent lieu au versement d'une contribution de la part de l’utilisateur. Dans ce cadre, le comité, relevant à nouveau que le demandeur était lui-même à l’origine de la situation cadastrale engendrant une emprise de son raccordement sur la parcelle voisine, décide que c’est à bon droit qu’Enedis, qui n’a fait que tirer les conséquences de l’état cadastral en vigueur, a mis à la charge du demandeur la contribution prévue par les dispositions de l’article L. 342-6 du code de l’énergie.

Le CoRDiS rejette ainsi les demandes de M. P. tendant à enjoindre à Enedis de mettre en œuvre, à sa charge, la réalisation des travaux nécessaires pour mettre en conformité certaines installations. 

ET AUSSI

Bilan de la CRE sur la mise en place du complément de rémunération en France 

Dans un rapport en date du 24 juin 2025, publié le 8 juillet 2025, la CRE dresse le bilan de la mise en place du complément de rémunération en France. 

Depuis 2016, les installations produisant de l’électricité d’origine renouvelable peuvent être soutenues soit en obligation d’achat (pour les plus petites d’entre elles), soit en complément de rémunération (à partir d’un certain seuil fixé jusqu’ici à 500 kW – il sera abaissé pour toutes les filières à 200 kW à compter du 1er janvier 2026). Dix ans après l’introduction du complément de rémunération par la loi n°2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, la CRE publie un bilan de ce dispositif, conformément à l’article R. 314-50 du code de l’énergie, et formule des recommandations d’évolutions pour l’avenir. 

A fin 2024, environ 25 % de la production soutenue (66,7 TWh au total) bénéficient du dispositif du complément de rémunération. En outre, celui-ci est aujourd’hui la voie privilégiée pour soutenir le développement de nouvelles installations de production d’électricité renouvelable (70% des contrats engagés sur la période 2023-2024). En conséquence, la CRE estime que les contrats soutenus par le biais de contrats de complément de rémunération devraient devenir majoritaires à compter de 2032.

La CRE formule plusieurs recommandations pour faire évoluer le dispositif à l’avenir, notamment :

  • calibrer le prix de marché de référence M0 afin qu’il soit le plus efficient possible ;
  • introduire une prime de performance annuelle, sans pour autant revenir sur le pas de temps de calcul, en général mensuel, du complément de rémunération ;
  • introduire une pondération pour certaines filières ;
  • mettre en place une stratégie de couverture par l’Etat des volumes soutenus, tout en conservant le prix de référence marché M0 calculé intégralement comme une moyenne de prix spot ;
  • dimensionner correctement la prime pour prix négatifs ;
  • améliorer son calibrage à court terme (mise en place d’une franchise harmonisée, compensation des installations sur la base d’une estimation plus dynamique de la perte de production) ;
  • mettre en œuvre une ou plusieurs expérimentations afin d’être en mesure à moyen terme d’alimenter la réflexion sur une évolution potentiellement plus conséquente de cette prime.
  • Consulter le bilan de la CRE sur la mise en place du complément de rémunération en France

Bilan de la CRE relatif à la mise en œuvre du seuil minimal de 70 % des capacités d’interconnexion pour les échanges d’électricité aux frontières françaises au titre de l’année 2024

Depuis 2020, consécutivement à l’adoption du Clean Energy Package, les gestionnaires de réseau de transport (GRT) d'électricité européens doivent mettre au moins 70 % de leurs capacités d’interconnexion à disposition des échanges transfrontaliers, conformément au règlement sur le marché intérieur de l’électricité.

Dans son rapport en date du 24 juillet 2025, la CRE publie les résultats obtenus sur les différentes frontières en 2024. Elle constate qu’en 2024, RTE a été en mesure de garantir le seuil minimal de 70 % dans 85 % des pas de temps en moyenne sur les frontières évaluées, ce qui représente un niveau très élevé à l’échelle européenne. Dans les situations où le seuil de 70 % n’est pas atteint, les capacités mises à disposition du marché par RTE aux frontières françaises demeurent élevées. Sur l’ensemble de l’année 2024, la France a exporté 101 TWh d’électricité et importé 12 TWh.

Guide de l'ACER et du CEER sur la planification des réseaux de distribution d'électricité 

L’ACER et le Conseil des régulateurs européens de l’énergie (CEER) ont publié le 28 juillet 2025 un guide de recommandations sur la planification des réseaux de distribution d’électricité conformément au plan d’action de l’Union européenne (UE) pour les réseaux du 28 novembre 2023. 

Le guide fournit des recommandations pour aider les gestionnaires de réseaux de distribution nationaux à s'aligner sur les objectifs de décarbonisation de l'Europe et à développer les réseaux pour opérer la transition énergétique. L’ACER et le CEER recommandent aux gestionnaires de réseaux de distribution d’électricité de planifier au moins 10 ans en avance le développement de leurs réseaux et de réaliser ces plans décennaux de développement à une fréquence biennale comme les gestionnaires de réseaux de transport. 

Ils recommandent que les gestionnaires de réseaux de distribution d'électricité basent leur planification sur trois axes principaux : l'élaboration de scénarios, l'évaluation des besoins du réseau et l'identification des projets nécessaires. De plus, ils soulignent l'importance de répondre aux exigences de flexibilité et d'assurer que les plans nationaux de distribution fournissent les informations indispensables à la méthodologie d'évaluation des besoins de flexibilité à l'échelle européenne. Ils encouragent également une coopération renforcée entre les différents gestionnaires de réseau. Enfin, ils proposent le contrôle par les autorités nationales de régulation du développement des réseaux de distribution en surveillant notamment la mise en œuvre des plans.

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